Dimanche rebelle ou romantique ?
« Un jour j’ai demandé à ma mère quel était le plus beau cadeau que je pouvais lui faire. Et tu sais ce qu’elle m’a répondu ? Elle a dit : Ce sera le jour où je tiendrais ton enfant dans mes bras. Alors si j’ai un rêve, un vrai, je crois que c’est celui-là. »
Dim est carré au carré : c’est un balèze qui sait ce qu’il veut. On le surnomme Dim parce qu’il est né un dimanche mais son vrai nom c’est Mamane, mais tout le monde l’appelle Dim, y compris ses parents. C’est chez lui qu’on dort en fait, enfin presque. Il est gérant d’une case de passage de l’Association française des volontaires du progrès et prend soin de nous comme si on était ses invités. On s’y sent bien. D’ailleurs à côté de Dim, on se sent bien. Il est un peu rebelle pour être libre et romantique pour croire en demain. Ca fait du bien.
« Ce que je pense de la rébellion touareg ? C’est des conneries ! On en a tous fait partie, de gré ou de « force ». T’étais obligé si tu étais touareg ! En tout cas moi, c’était de gré. Très tôt j’ai voulu m’engager dans la rébellion, vers 16 ans, pour la justice, pour le racisme, pour stopper les persécutions. Tu sais, on a jamais eu vraiment les mêmes droits que les autres nigériens ; quand on se déplaçait sur Niamey, on sentait le regard des autres sur nous . C’est pour tout ça que tu t’engages, je crois parce que tu crois que ça va changer. Et puis quelques années plus tard, tu fais le bilan : tu te rends compte que des frères se sont battus jusqu’à la mort et que quelques uns ont su tirer leur épingle du jeu pour s’en sortir mieux que les autres. Aujourd’hui, il y a des hommes politiques touaregs, des dirigeants, des leaders. Qu’est ce qu’ils font finalement ? Ils font ce que nous détestions et qui nous a fait prendre les armes : rien si ce n’est profiter de leurs nouveaux statuts et de leurs avantages. Achetés. Achetés par un pouvoir lui même acheté par d’autres. Alors merde ! Si c’était à refaire je le referais pas. Malgré cela, de temps en temps (pas toujours, soyons honnêtes !!), je crois qu’on peut faire avancer les choses dans le bon sens, quand même. Alors, c’est ce que j’essaie de faire à mon niveau, autour de moi, en montrant qu’on peut envisager sa vie honnêtement, animé par des valeurs, une éthique. C’est comme ça qu’on dit, non ? Je le fais simplement, chaque jour, en travaillant et en me contentant de ce que j’ai. »
« Ce que je pense de la pratique de la religion ? C’est des conneries ! La religion c’est entre toi et Dieu. Y’a pas besoin de code, de règles, de trucs à faire. Y’a combien de personnes qui se disent être de bons musulmans, faire les cinq prières, le ramadan, et qui font n’importe quoi à côté, y compris voler son voisin ou son propre frère ! Y’a combien de personnes autour de nous qui disent faire le ramadan et qui mangent en cachette pendant la journée ? Comme si Dieu c’était les autres : ils te voient pas manger alors ils te jugent pas alors c’est bon, tu es un bon croyant. Dieu, Il te voit où que tu sois, même si tu es caché dans la marmite. C’est Lui qui te juge, c’est tout, c’est Lui qui t’ouvre les portes du paradis. Je ne les juge pas, ils font se qu’ils veulent, mais qu’ils ne viennent pas t’expliquer alors comment tu dois te comporter. J’aimerais simplement qu’ils aient plus de courage et qu’ils aillent jusqu’au bout, qu’ils choisissent en faisant fi des autres, de pratiquer comme ils le souhaitent. Moi, je crois en Dieu, mais ça n’a rien à voir avec la religion. »
« Ce que je pense de l’amour ? Ce truc là, c’est pas des conneries je crois ! D’ailleurs, tu sais, je crois bien que c’est le seul truc qu’est pas des conneries !! En tout cas, moi, c’est ce qui me fait avancer, c’est ce qui me fait croire en l’avenir, dans un futur. C’est pour ça que je bosse, c’est pour ça que je reste ici à la case. Pour gagner ma vie honnêtement. Je pourrais gagner dix fois plus en faisant autre chose, notamment du trafic de ce que tu veux ou bosser avec les touristes, mais je veux m’en sortir proprement pour que celle qui est de l’autre côté de la méditerranée soit fière de moi. Sinon à quoi bon ? Comment peut-on mélanger un sentiment aussi pur et sincère que l’amour avec des trucs dégueulasses comme le vol ou le trafic ? En fait, on s’est donné rencart dans un an en novembre 2005, en France. Alors, j’économise chaque jour pour partir la rejoindre. Et puis, sait-on jamais, si ça me plaît, peut-être que je resterais là-bas. Et puis si tout va bien alors peut-être qu’un jour ma mère tiendra son petit-fils dans ses bras. »
Mamane Maïga dit Dim (comme dimanche) a 27 ans et vit à Agadez au Niger.
« Ce que je pense de la rébellion touareg ? C’est des conneries ! On en a tous fait partie, de gré ou de « force ». T’étais obligé si tu étais touareg ! En tout cas moi, c’était de gré. Très tôt j’ai voulu m’engager dans la rébellion, vers 16 ans, pour la justice, pour le racisme, pour stopper les persécutions. Tu sais, on a jamais eu vraiment les mêmes droits que les autres nigériens ; quand on se déplaçait sur Niamey, on sentait le regard des autres sur nous . C’est pour tout ça que tu t’engages, je crois parce que tu crois que ça va changer. Et puis quelques années plus tard, tu fais le bilan : tu te rends compte que des frères se sont battus jusqu’à la mort et que quelques uns ont su tirer leur épingle du jeu pour s’en sortir mieux que les autres. Aujourd’hui, il y a des hommes politiques touaregs, des dirigeants, des leaders. Qu’est ce qu’ils font finalement ? Ils font ce que nous détestions et qui nous a fait prendre les armes : rien si ce n’est profiter de leurs nouveaux statuts et de leurs avantages. Achetés. Achetés par un pouvoir lui même acheté par d’autres. Alors merde ! Si c’était à refaire je le referais pas. Malgré cela, de temps en temps (pas toujours, soyons honnêtes !!), je crois qu’on peut faire avancer les choses dans le bon sens, quand même. Alors, c’est ce que j’essaie de faire à mon niveau, autour de moi, en montrant qu’on peut envisager sa vie honnêtement, animé par des valeurs, une éthique. C’est comme ça qu’on dit, non ? Je le fais simplement, chaque jour, en travaillant et en me contentant de ce que j’ai. »
« Ce que je pense de la pratique de la religion ? C’est des conneries ! La religion c’est entre toi et Dieu. Y’a pas besoin de code, de règles, de trucs à faire. Y’a combien de personnes qui se disent être de bons musulmans, faire les cinq prières, le ramadan, et qui font n’importe quoi à côté, y compris voler son voisin ou son propre frère ! Y’a combien de personnes autour de nous qui disent faire le ramadan et qui mangent en cachette pendant la journée ? Comme si Dieu c’était les autres : ils te voient pas manger alors ils te jugent pas alors c’est bon, tu es un bon croyant. Dieu, Il te voit où que tu sois, même si tu es caché dans la marmite. C’est Lui qui te juge, c’est tout, c’est Lui qui t’ouvre les portes du paradis. Je ne les juge pas, ils font se qu’ils veulent, mais qu’ils ne viennent pas t’expliquer alors comment tu dois te comporter. J’aimerais simplement qu’ils aient plus de courage et qu’ils aillent jusqu’au bout, qu’ils choisissent en faisant fi des autres, de pratiquer comme ils le souhaitent. Moi, je crois en Dieu, mais ça n’a rien à voir avec la religion. »
« Ce que je pense de l’amour ? Ce truc là, c’est pas des conneries je crois ! D’ailleurs, tu sais, je crois bien que c’est le seul truc qu’est pas des conneries !! En tout cas, moi, c’est ce qui me fait avancer, c’est ce qui me fait croire en l’avenir, dans un futur. C’est pour ça que je bosse, c’est pour ça que je reste ici à la case. Pour gagner ma vie honnêtement. Je pourrais gagner dix fois plus en faisant autre chose, notamment du trafic de ce que tu veux ou bosser avec les touristes, mais je veux m’en sortir proprement pour que celle qui est de l’autre côté de la méditerranée soit fière de moi. Sinon à quoi bon ? Comment peut-on mélanger un sentiment aussi pur et sincère que l’amour avec des trucs dégueulasses comme le vol ou le trafic ? En fait, on s’est donné rencart dans un an en novembre 2005, en France. Alors, j’économise chaque jour pour partir la rejoindre. Et puis, sait-on jamais, si ça me plaît, peut-être que je resterais là-bas. Et puis si tout va bien alors peut-être qu’un jour ma mère tiendra son petit-fils dans ses bras. »
Mamane Maïga dit Dim (comme dimanche) a 27 ans et vit à Agadez au Niger.
Agadez - Niger, le 10 novembre 2004.
Mots-clés
Aire géo-culturelle: Afrique de l’OuestCatégorie d’acteur: Employé ou ouvrier - Jeune
Itinéraire de vie: Changement de la personnalité - Désir d’échange et de partage