Abdoulaye est acteur pour la paix en Casamance

Nous découvrons la Casamance, dans le sud du Sénégal, une magnifique région qui malheureusement est en guerre depuis de nombreuses années. Abdoulaye, un jeune lycéen, est acteur pour la paix.


Abdoulaye Diémé est élève au lycée Djignabo de Zinguichor. Il a 22 ans et est originaire du village de Diegoune. Abdoulaye est né en 1982, l’année où le conflit entre les troupes rebelles casamançaises et l’armée sénégalaise a éclaté. Depuis la guerre ne s’est jamais arrêtée. Il n’a jamais connu la paix.



Pourquoi as-tu choisis de t’investir sur la question de la paix en Casamance ?
C’est une réaction face à une injustice qui nous a frappée et qui nous menace encore aujourd’hui. La guerre a fait beaucoup de malheureux ici. Des gens ont tout perdu, des villages ont été abandonnés. Dans notre famille nous avons souffert de cette guerre. Et puis, ce sont nous les jeunes qui demain devront vivre avec les séquelles de cette guerre. Nous devons dire ce que nous voulons pour notre région, il nous faut élever la voix. Il faut que nous participions dès maintenant à la construction de la paix pour ne pas avoir à la subir demain.

Et comment t’engages-tu pour cette reconstruction ?
J’ai intégré depuis cette année, depuis la seconde, la troupe de théâtre du lycée Djinabo. J’aime beaucoup le théâtre. Je trouve que c’est un bon moyen d’expression et de partage des idées avec les gens. Avec la troupe nous avons monté une pièce qui s’appelle « La réconciliation ». C’est une pièce qui parle de la guerre et qui interroge les spectateurs : Comment réussirons-nous demain à vivre avec ces combattants qui ont pris le maquis et qui vont revenir dans les villages ? Devrons-nous les rejeter ? Les accueillir comme s’il ne s’était rien passé ? Imagnier reconstruire la région avec eux ? Ou les punir ?

Comment se passe vos spectacles ?
Nous nous déplaçons pour rencontrer les gens qui vivent dans les petits villages pour leur présenter la pièce. Le spectacle est gratuit et tous les villageois des petits aux grands sont invités à participer. En général, nous faisons un voyage sur deux jours. Le premier soir nous jouons la pièce et le lendemain matin nous organisons ce que l’on appelle une « causerie ». C’est un moment d’échanges où les gens ont la possibilité de parler des questions que ça leur a posé. Ensuite nous participons ensemble à des ateliers libres d’expressions artistiques sur le thème de la guerre et de la reconstruction de la paix en Casamance. Des ateliers de peinture, de contes, de nouvelles, de poésie. Les gens peuvent dire ce qu’ils pensent en s’exprimant par l’art.





Et tu es content, ça marche bien ?
Oui, ça marche très bien. Tu vois Oscar, ce qui est important, c’est de réussir à discuter de cette guerre avec les villageois qui ont souffert. Par le passé, on ne préférait ne pas en parler, c’était un sujet tabou. Notre rôle, c’est de faire prendre conscience aux gens qu’il faut que nous parlions ensemble, entre casamançais, et que nous trouvions nous-mêmes les clés pour sortir de cette situation. Nous sommes ceux qui avons vécus la guerre et nous devons décider de la façon dont nous voulons reconstruire la paix. Quels seront nos outils pour enterrer définitivement les armes en Casamance ? Je veux porter ce message. Je veux être acteur de cette reconstruction.

Avant de nous quitter Abdoulaye a tenu à nous présenter ses professeurs de théatre et de français ainsi que plusieurs des ses camarades qui l’accompagnent dans son aventure.







Ziguinchor - Senegal, le 10 juin 2004.


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