Changer le monde avec les femmes et les frangines Issoufou

Tout a commencé par une simple demande à Madame Issoufou croisée près du marché Est dans une allée d’Agadez. Peu après, Amina, Fourera et Nafissa étaient réunies dans la cour familiale. On organisait un atelier « tressage » tout en causant et en s’amusant d’un rien et de mélodies joyeuses. « Et si on remplaçait les politiciens par des femmes ? » annonce Fourera.




Il suffit parfois simplement de demander quelque chose. Ce soir, c’est en sollicitant un coup de main pour reconstituer mon tressage à une charmante dame du voisinage, que je fais la connaissance de ses filles Amina, Fourera, Zeynabou, Nafissa et des plus petits : Salimata et Haouwa. Nous nous asseyons par terre dans la cour familiale, le néon blanc nous éclaire en invitant ouvertement la plupart des moustiques chassant dans les parages. Les petits gambadent autour de Fourera, d’Amina et moi qui restons immobiles à cause de l’ouvrage qui se construit sur ma tête. On rigole de pas grand chose, de la situation et de tout l’aménagement qui est nécessaire pour la coiffure. La natte, le matelas, les coussins, le pichet d’eau. Tout cela installé en deux temps trois mouvements. Puis on s’apprend. Et toi comment tu t’appelles ? C’est votre maison familiale ? Combien êtes-vous dans la famille ? Que faites-vous à Agadez ? Des vacances pour certaines, l’école qui a démarré pour d’autres. Les conversations se croisent. Les plus jeunes posent des questions aux aînées qui traduisent en haoussa. Chaque moment est utile pour poser une question et en savoir plus. La soirée ne suffit pas tout à fait pour savoir les envies et les aspirations des frangines de la famille Issoufou. Il faut plus de temps et se revoir le lendemain. « Allez merci énormément pour la coiffe les filles et à demain donc ! ».

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Fourera a tout raconté d’emblée. Elle a vingt trois ans et planche en « mass communication » à l’université de Zaria au Nigeria. « Mon rêve c’est de faire une action pour les petits et pour les pauvres qui n’ont pas accès l’école. J’ai failli interrompre mes études pour travailler avec l’Ong Action Contre la Faim mais cela n’a malheureusement pas marché. Sinon j’aurais foncé !
Je n’ai pas confiance dans les politiciens qui courent après leurs privilèges et leurs luttes de pouvoir. Je crois qu’il faudrait transformer tous les leaders politiques en femme ! Elles sont plus pacifiques et se foutent du pouvoir ! Elles sont plus sensibles aux relations, plus respectueuses des autres. Si la politique était plus romantique, plus près du coeur je veux dire, on pourrait changer les choses. Ça me plairait de créer une organisation pour mettre en avant le rôle et la place de la femme.
Je crois qu’il faut construire une paix durable et dire aux jeunes de prendre beaucoup plus soin du monde que ne l’ont fait leurs aînés. J’aimerais aussi voyager, rencontrer des gens et apprendre des autres. J’aime beaucoup cela car je me sens plus riche, plus proche de moi et mieux dans mes baskets. Ma famille est très soudée, je souhaite qu’elle le reste toujours. C’est très important pour moi ».



Le lendemain soir, c’est Amina (à gauche sur la photo) qui raconte. Elle a 22 ans et a choisi d’être sage-femme. Trois ans de formation à l’Ecole Nationale de Santé publique de Niamey ne lui suffisent pas pour trouver du boulot, aussi souhaite-t-elle compléter sa formation pour devenir technicienne supérieure. Elle dit avoir toujours été très curieuse à propos de ce métier et ses « vieux », ses parents, l’ont toujours poussé comme tous les frangins et frangines, à poursuivre des études. « J’aurais aimé être chanteuse. J’ai chanté en fait avec un groupe de rap ici à Agadez. J’écrivais des chansons d’amour car je pense que l’on ne peut pas vivre sans amour et sans confiance. J’écrivais les textes et je les donnais au chanteur. Aujourd’hui, je crois qu’il faut vraiment sensibiliser les jeunes au risque du SIDA et éduquer les jeunes filles à la sexualité. Ici tu vois, mes parents me poussent à me marier et cela me dérange. J’aimerais voyager pour découvrir d’autres façons de vivre et de voir les choses mais c’est très difficile. En fonction des élections présidentielles qui ont lieu dans une semaine, peut-être que mon père pourrait avoir une bonne place et obtenir un dossier pour que nous puissions étudier à l’étranger. On verra ! ».

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Nafissa, 17 ans, porte le dernier né de la famille Issoufou sous le bras et s’occupe de ranger du linge, touche un peu à la cuisine en laissant toujours frotter ses sandales sur le sol et en arborant un sourire complice et chaleureux. « Moi je crois qu’il faut changer le monde et changer le Niger. Il faut d’abord se révolter pour ne pas se marier systématiquement et pouvoir finir ses études, puis changer la politique qui est gâtée. Tous ceux qui font de la politique ont trop de pouvoir et prennent l’argent des autres pour leur tirelire. Mais comment faire pour changer cela ? Je n’ai pas l’impression que je pourrais faire grand chose ! ».


Oui, pas facile de sentir que l’on peut changer quoi que ce soit ! Peut-être que l’on peut commencer par se changer les idées !? Ça vous dirait d’improviser une petit soirée musique avec toi, Fourera, Amina et Seynabou ?


Ok, c’est parti ! Ah vous avez une guitare !? Super ! On va vous chanter l’histoire « Aminata » !

- Soirée musique avec Aminata, Zeynabou, Nafissa et Fourera (format WMV - 7 Mo) -> Entrée du spectacle !











Agadez - Niger, le 7 novembre 2004.






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Aire géo-culturelle: Afrique de l’Ouest
Catégorie d’acteur: Femme - Jeune
Médias: Audio-vidéo
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